« Je refermai la porte derrière moi, la verrouillai et, rabattant le monocle en plastique du cabinet, je m’assis pour pisser. Mes yeux s’attardait distraitement sur une lézarde dans un angle du mur. Un robinet coulait goutte à goutte derrière la paroi, on entendait au loin le bruit d’un transistor. Assis là depuis un moment déjà, le regard fixe, ma foi, je méditais tranquillement, idéalement pensif, pisser m’étant assez propice je dois dire, pour penser. Du moment que j’avais un siège, moi, du reste, il ne me fallait pas dix secondes pour que je m’éclipse dans le monde délicieusement flou et régulier que me proposait en permanence mon esprit, et quand, ainsi épaulé par mon corps au repos, je m’étais chaudement retranché dans mes pensées, pour parvenir à m’en extraire, bonjour. »
Jean-Philippe Toussaint, L’appareil-photo, Paris, Minuit, 1988, p. 31.
comme c’est joliment et parfaitement dit… ^^